15° 57′ S, 5° 42′ W! Sainte-Hélène! L’enfer sous les Tropiques! Une île volcanique de 122 km², située au milieu de l’océan Atlantique sud, à 3’500 km des côtes brésiliennes et à 1’930 km des côtes africaines. A la suite de l’issue brutale des Cent Jours, Napoléon est exilé par les Britanniques sur cette île du bout du monde. L’Empereur déchu y passe les 6 dernières années de sa vie. Il débarque le 16 octobre 1815 à bord du HMS Northumberland, avec quelques compagnons: le Grand Maréchal du Palais, Henri Gratien Bertrand, le général Gourgaud, Las Cases et le Général Montholon, Louis-Etienne Saint-Denis, dit «le Mamelouk Ali», et son valet de chambre Marchand. A son arrivée, la population de ce territoire d’outre-mer britannique augmente de manière significative: Sainte-Hélène abrite désormais près de 1’500 soldats anglais (en plus des 800 militaires de la compagnie des Indes) et 500 marins de la flottille de guerre, ainsi que des officiels du gouvernement. Tous sont chargés de surveiller l’illustre prisonnier. Enfermé à Longwood House, une maison sans confort, épié en permanence par ses gardiens, Napoléon est soumis à des vexations de la part de Hudson Lowe, le gouverneur. La monotonie le gagne. Son état de santé se dégrade. Il meurt le 5 mai 1821.
Alexandre Dumas raconte les derniers moments de l’Empereur: «Le 5 au matin, le mal était parvenu à son comble: la vie n’était plus, chez le malade, qu’une végétation haletante et douloureuse; la respiration devenait de plus en plus insensible; les yeux, ouverts dans toute leur grandeur, étaient fixes et atones. Quelques paroles vagues, dernière ébullition de son cerveau en délire, venaient de temps en temps mourir sur ses lèvres. Les derniers mots que l’on entendit furent ceux de tête et d’armée. Puis la voix s’éteignit, toute intelligence parut morte, et le docteur lui-même crut que le principe de la vie était éteint. Cependant, vers les huit heures, le pouls se releva, le ressort mortel qui fermait la bouche du moribond sembla se détendre, et quelques soupirs profonds et suprêmes s’exhalèrent de sa poitrine. A dix heures et demie, le pouls était anéanti. A onze heures et quelques minutes, l’Empereur avait vécu…» C’est le début d’un mythe: celui de Prométhée enchaîné. Les écrivains romantiques, parmi lesquels figure Alexandre Dumas dont nous reproduisons le chapitre, sont fascinés par la personnalité de l’Empereur et sa fin tragique. Napoléon devient un héros pour toute une partie de la jeunesse française.
Alain Chardonnens, historien