Fuyant l’épidémie de choléra et les complots royalistes, Alexandre Dumas quitte Paris en mai 1832 pour se rendre en Suisse. De ce séjour, il rédigera ses célèbres Impressions de voyage en Suisse, un récit de voyage réédité à Paris, aux Editions L’Harmattan.
La première étape suisse d’Alexandre Dumas est Genève. L’auteur décrit la ville de cette manière: «Genève est, après Naples, l’une des villes les plus heureusement situées du monde: paresseusement couchée comme elle l’est, appuyant sa tête à la base du Mont Salève, étendant jusqu’au lac ses pieds que chaque flot vient baiser, elle semble n’avoir autre chose à faire que de regarder avec amour les mille villas semées aux flancs des montagnes neigeuses qui s’étendent à sa droite, ou couronnent le sommet des collines vertes qui se prolongent à sa gauche. Sur un signe de sa main, elle voit accourir, du fond vaporeux du lac, ses légères barques aux voiles triangulaires qui glissent à la surface de l’eau, blanches et rapides comme des goélands, et ses pesants bateaux à vapeur qui chassent l’écume avec leur poitrail. Sous ce beau ciel, devant ces belles eaux, il semble que ses bras lui soient inutiles, et qu’elle n’a qu’à respirer pour vivre; et cependant cette odalisque nonchalante, cette sultane paresseuse en apparence, c’est la reine de l’industrie, c’est la commerçante Genève qui compte quatre-vingt-cinq millionnaires parmi ses vingt mille enfants.»
Mais Genève dégage également un sentiment d’opulence: «Parmi toutes les capitales de la Suisse, Genève représente l’aristocratie d’argent: c’est la ville du luxe, des chaînes d’or, des montres, des voitures et des chevaux. Ses trois mille ouvriers alimentent l’Europe entière de bijoux; soixante-quinze mille onces d’or et cinquante mille marcs d’argent changent chaque année de forme entre leurs mains, et leur seul salaire s’élève à deux millions cinq cent mille francs»…
Alain Chardonnens, historien, enseignant et formateur à Fribourg