Le 8 septembre 2020, le Guardian a confié à l’intelligence artificielle GPT-3 le soin d’écrire l’un de ses éditos. Jusque-là, les robots dans les rédactions se contentaient de cracher à la minute des textes courts, ces news qui inondent les écrans de vos jours et de vos nuits. Pour mieux vendre votre temps de cerveau aux géants du web, les GAFA… Le quotidien britannique a-t-il franchi le Rubicon en remplaçant l’analyse humaine par celle d’un robot? Joue-t-on aux apprentis sorciers en confiant certaines manettes de notre information, gage d’une démocratie saine et vivante, à des machines? Faut-il s’en inquiéter? S’en réjouir?
Chez Sept, nous n’avons rien contre la technologie ni l’innovation. Elles font partie de notre ADN depuis notre lancement en 2014, tant qu’elles nous servent à développer de nouvelles formes de narration comme la réalité augmentée que nous vous proposons dans chacun de nos Sept mook depuis 2016. En revanche, nous sommes convaincus qu’aucune machine ne peut remplacer les nécessaires arpenteurs de la planète que sont nos auteurs, journalistes, écrivains, photographes, dessinateurs... Que le contact humain est central dans notre métier. Tout comme la curiosité, le respect, l’humilité, la persévérance et l’envie de raconter des histoires vraies, des récits à hauteur d’hommes justement.
Ces promesses, vous les retrouverez, j’en suis persuadé, dans les pages de notre dernier numéro de l’année 2020 consacré au photojournalisme suisse, un rendez-vous désormais annuel tant notre pays regorge de talents. Qu’ils soient célèbres ou moins connus, ces professionnels de l’image parlent de nous, de vous, racontent notre histoire. Celle, par exemple, d’une Suisse rebelle qui, contrairement aux idées reçues, descend régulièrement dans la rue pour faire entendre sa voix. Leurs reportages nous obligent à réfléchir, à nous positionner, à nous remettre en question, à nous (in)former, à nous montrer curieux... Comme devrait le faire tout projet journalistique digne de ce nom.
Merci donc à eux ainsi qu’à Markus Schürpf, directeur de Fotobüro à Berne, qui nous a ouvert les portes de l’univers de Paul Senn, l’un des inventeurs du photojournalisme moderne dans les années 1930, dont nous publions les très rares photos couleur de la société américaine après-guerre. C’est également Markus qui nous a permis de rencontrer Werner Haug dont les photographies, précieuses et publiées pour la première fois, nous plongent dans l’enfer concentrationnaire de l’enfermement administratif en Suisse.
La photographie suisse, c’est aussi celle de ses jeunes pousses. Celles que soutient le Prix des Jeunes Talents vfg dont nous sommes l’un des partenaires et avec lequel nous avons lancé le prix Sept du photojournalisme. Cette année, sa lauréate, Laurence Kubski nous fait découvrir l’élevage des grillons en Chine.
Ce dernier numéro 2020 est aussi et surtout l’occasion de vous remercier, chère lectrice, cher lecteur, de votre soutien tout au long de cette année 2020 étrange et déstabilisante qui a vu, entre autres, La Poste suisse égarer une partie de nos mooks estivaux. Et nous tenons ici à réitérer nos excuses aux personnes concernées. Grâce à vos messages, à vos attentions, à vos coups de pouce, vous nous avez permis de tenir le cap. Nous aurions pu vous offrir des fleurs, mais les fleurs, c’est périssable... Alors nous avons préféré vous faire le cadeau d’un mook plus dodu, d’un supplément d’images et d’information à taille humaine.