Sept.info | Le retour au pays (5/5)

Le retour au pays (5/5)

Il est Manyuol Mawuein, il est devenu Ali, puis William Mawwin. Le jeune Sud-Soudanais a connu l’esclavage, l’emprisonnement, l’amputation, l’exil. Après des années de souffrance et de peur, il s’installe à Phoenix. Dernier épisode.

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William Mawwin, 2009. © DR

William possède une voiture, un travail et sa vie s'écoule paisiblement. Il fait alors la connaissance d’une Américaine de 18 ans qui aime passer du temps avec les réfugiés soudanais. Quand William la rencontre, il lui propose de l’aider à résoudre les problèmes familiaux auxquels elle fait face. Peu de temps après, elle commence à l’appeler régulièrement et lui demande de la conduire ici ou là. Lorsqu’il m’a parlé d’elle, je me suis demandée si je pouvais lui en demander plus. «Quelques temps plus tard, nous nous sommes mis ensemble», a-t-il simplement dit. Il dit avoir été naïf de s’être impliqué avec quelqu’un, bien qu’aujourd’hui il conserve toujours une photo d’elle dans son portefeuille. Je m’habillais en noir tous les jours pour montrer que j’étais mort, mais toujours là. J’ai commencé à m’habiller de cette façon en Afrique, après m’être tiré de captivité. Porter du blanc est le symbole d’un jour paisible, d’un jour meilleur. Si je portais un mélange de vêtements noirs et blancs, cela voulait dire que tout pouvait arriver, le meilleur comme le pire. Je me suis presque toujours habillé en noir, jusqu’au jour où je suis devenu père.

Le dernier jour de septembre 2003, William est à l’école, en cours d’anglais. Un agent de sécurité vient le chercher et le conduit jusqu’à l’hôpital Arrowhead. Il y restera toute la nuit et les deux jours suivants. Le 2 octobre à 1 h 45 du matin, la fille de William naît par césarienne, et il est là pour couper le cordon ombilical. Ce n’est qu’après être sorti du bâtiment qu’il s’assied et pleure. Il m’a confié qu’au moment où il était à nouveau rentré dans l’hôpital, sa vision de la vie toute entière avait été bouleversée. William et sa compagne ont donné au bébé un nom dinka: Achol. Jusque là, je disais aux gens ce qu’ils voulaient entendre. Je gardais tout pour moi. J’étais comme un fantôme, vide, vivant au jour le jour. Je ne me souciais pas de ma propre vie. Maintenant, je vis pour quelqu’un, pour lui dire que je l’aime, pour entendre des mots que je n’avais jamais entendus avant. Quand quelqu’un t’appelle «papa», tu te sens tellement fier…

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