Sept.info | En quête de Jacques Thévoz

En quête de Jacques Thévoz

© Fonds Jacques Thévoz / BCU Fribourg
Jacques Thévoz, cigarette au bec, oeil vissé sur l’objectif.

Adrien Laubscher-Thévoz évoque son père Jacques Thévoz, un homme hors normes, et son patrimoine artistique.

Genève, le 1er mars 1983. A deux pas du jet d’eau, dans le prolongement de ce qui s’appelle aujourd’hui la Cité du Temps, Jacques Thévoz inspirait une dernière fois l’air de la cité de Calvin. Il allait enjamber la barrière du pont de la Machine et sauter dans le remous de l’écluse qui délimite la fin du Léman. Cet endroit marque aussi la résurgence du cours du Rhône, qui poursuit ensuite sa course jusqu’à la mer Méditerranée. Le film d’une vie de bohème s’arrête alors. Epuisé par la recherche incessante de fonds pour financer ses projets de films, et blasé d’avoir surfé sur des vagues d’avant-garde sans pouvoir jouir des éloges qui accompagnent ce genre de gestes, il est révolté par le manque de reconnaissance de la profession. Il décide lui-même du moment du clap de fin. Jacques voulait «mourir lucide», une phrase qui résonne encore dans la mémoire des gens qui l’ont côtoyé, comme moi, son fils. Apparemment, il y est parvenu.

La personnalité en acier trempé de Jacques Thévoz, incapable de mettre son ego dans sa poche, a certainement contribué à étouffer un talent aussi brut et éclatant que le sien. Je parle ici d’un homme qui a tout donné pour son art, sans concessions ni fausse diplomatie. Amoureux de la différence, de la multitude et surtout des femmes, il n’aura de cesse de courir après un idéal. Séducteur patenté et fêtard bagarreur, naviguant entre les salons bourgeois et les pince-fesses du ghetto bolze, il s’affichait partout comme athée et anarchiste militant. Cet autodidacte qui ne laissait personne indifférent ne craignait pas de mettre en avant le sens pratique comme une forme supérieure d’intelligence. Brûlant la vie par les deux bouts, cet anti conformiste assumé agira sans cesse comme un utopiste convaincu, ajoutant de l’intensité quand il sentait le bon goût et la bienséance pointer leur nez. Il s’était fait un plaisir de mettre en pratique la devise pataphysicienne suivante: «Je m’applique volontiers à penser aux choses auxquelles les autres ne penseront pas.»

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