En mars 2015, le désert de l’Atacama, le plus aride de la planète, a été inondé. Cela faisait vingt-deux ans qu’il n’y était pas tombé une seule goutte. Malgré cet évènement rarissime, la ville de Quillagua reste inscrite dans le Guinness des records pour son absence de précipitations. Une distinction détenue depuis 1972. Car au cœur de l’Atacama, au nord du Chili, le soleil écrase tout. Ici, la sècheresse est telle que les corps des défunts se momifient naturellement. A 13 heures, les vieilles carcasses des voitures sont brûlantes, la cannette de Coca se réchauffe comme dans un micro-ondes, la poussière tarit les gorges, le sable, par bourrasques, creuse les murs et les toits en tôle des maisons. Il n’a jamais fait si chaud. Pourtant, José, le guide touristique, peau tannée et regard de vieux Sioux, ne semble pas s’en émouvoir. Avant ce jour de mars 2015, José n’avait jamais «senti la pluie sur [son] visage». Car, chaque fois que les nuages de l’Altiplano s’approchent, les gouttes s’évaporent avant de toucher le sol brûlant de sa ville natale.
Pourtant, jusque dans les années 1990, dans le petit pueblo (village, ndlr), l’agriculture était florissante et les vacanciers venaient par centaines se baigner dans le Loa, le plus long fleuve du Chili qui traverse la commune. Quillagua a donc été une oasis pendant plusieurs siècles. Des empereurs incas, des conquistadors, les armées péruviennes et boliviennes s’y sont abreuvés et reposés durant leurs expéditions. A cette époque, Quillagua était encore un coin de verdure avec des champs de luzerne et de maïs verdoyants où les touristes venaient se délecter de crevettes et de miel, spécialités locales.