Šaban reprend une gorgée de café. Il paraît que c’est un habitué de l’endroit. Crâne rasé, barbe rousse. L’échange est intense et les questions sur son pays d’origine, qu’il a quitté dix-sept ans auparavant, s’enchaînent. Après un long silence, il nous glisse: «Si vous voulez, je peux vous montrer mon pays.» Des gouttelettes martèlent la vitre et glissent lentement le long du hublot. Le ciel est bas, gris. Au loin, on distingue des lettres lumineuses: Sarajevo International Airport. Quelques semaines séparent ce moment de cet après-midi d’hiver froid et humide, comme la Suisse les connaît si bien, durant lequel un inconnu, accoudé au bar, engage la conversation. Une rencontre anodine qui incitera à un voyage photographique de trois ans dans ce coin des Balkans.
Le 14 décembre 2015, les accords de Dayton ont eu 20 ans. Ils mettaient fin au conflit qui déchira la Bosnie de 1992 à 1995. Une génération.Nous voulions non seulement donner à voir les contrées et les villes dont les noms résonnent encore dans notre mémoire collective, mais aussi mettre en lumière les visages de celles et ceux qui l es peuplent. Quel impact une situation d’après-guerre a-t-elle sur les jeunes Bosniens?