Sept.info | La Suisse, nid d'espions (2/9)
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Au milieu des uniformes verts et des smokings, Albert Meyer fait la connaissance d’une jeune fille fort éplorée.© Juliette Léveillé

La Suisse, nid d'espions (2/9)

Tandis que la Seconde Guerre mondiale embrase l’Europe, la Suisse devient une plaque tournante d’espions de tous bords. Dont le jeune français Albert Meyer qui va mener ses premières missions.

Gaston Pourchot, chef du Service de renseignement (SR) français, disposait de ses propres réseaux en France occupée et en Allemagne. Par prudence, il avait décidé qu’Albert Meyer ne devait pas y avoir accès. Le jeune homme devrait trouver lui-même ses propres informateurs. Malgré son inexpérience en matière d’espionnage, Albert Meyer recrutera rapidement des dizaines d’informateurs au hasard de ses expéditions. Il constituera son réseau le plus solide au sein de l’Association des engagés et combattants volontaires de la guerre de 14-18, présidée par son père jusqu’à sa mort en juin 1940. L’ordre religieux des marianistes qui s’était chargé de ses études à Belfort lui fournira logements, alibis, protections et informations; enfin, une famille riche en cousins disséminés du nord au sud de l’Hexagone complétera le dispositif de départ. Le hasard des rencontres fera le reste. Rapidement, Meyer pourra ainsi compter sur la collaboration de dizaines d’informateurs qui lui enverront régulièrement messages et correspondances dans quelque poste restante des environs de Belfort où des employés complices se chargeront d’intercepter toute missive adressée à l’un ou l’autre de ses faux noms. Un système ingénieux qui lui servira également lors de ses voyages et lui évitera ainsi d’avoir à se déplacer avec des notes compromettantes.

Pourchot lui ayant confié pour seule et unique mission de reconstituer de façon permanente l’ordre de bataille militaire allemand en zone occupée, Meyer partait chaque mois en expédition, souvent dans des conditions éprouvantes. Ses rapports de mission en témoignent: «Avranches, note-t-il en janvier 1941. Je trouverai à manger le 9 à 19 heures. Voici trente-six heures que je n’ai pu faire un seul repas. La pénurie de ravitaillement, le manque de wagon-restaurant, les retards de trains se sont opposés à tout repas depuis Belfort. Par sa situation géographique, Avranches était un point stratégique intéressant du temps passé. Actuellement, placé à la croisée des routes du Nord, de Paris ce ne sera qu’un lieu de passage de transition pour l’armée d’invasion. De cette façon les véhicules les plus remarqués porteront le signe distinctif (suit un petit dessin représentant un camion, nda). Les soldats composant les différentes armées cantonnées dans ces régions ont vingt à trente ans. Leur moral est bon, bien qu’ils aient été touchés de ne pas passer Noël en famille. Mon tour de ville. A un kilomètre se trouve la base aérienne d’importance secondaire. Contrairement à un faux bruit répandu il est inexact qu’une escadrille italienne soit venue s’établir à Avranches il y a un ou deux mois.» Poursuivant son expédition vers la Bretagne, Meyer arrive à Saint-Malo. Il note: «La troupe est maintenue exclusivement dans les faubourgs de la ville […] derrière les remparts solides où s’abrite le vieux Saint-Malo des corsaires avec ses ruelles malfamées, soldats allemands de toutes armes se côtoient (marine, aviation, armée de terre). On y croise les pilotes venus de la base de Dinan, la Kriegsmarine (marine de guerre, ndlr) affectée au dragage des mines, des fantassins M47 et M48, des artilleurs dont les numéros d’unité sont 24 et 632.» Sa mission de repérage terminée, Meyer repassait par Paris quelques semaines plus tard, avant de reprendre la route de Berne. Bien lui en prit. Dans la capitale, il allait recueillir sa première information de taille. L’une de ces informations qui peuvent changer le cours des batailles, décider d’une victoire.

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