Devant l’écran d’ordinateur, Mohamed, contacté via Skype, reste interdit quelques minutes. Comment raconter la tragédie qui s’abat sur la Syrie jour après jour en cette année 2014? Cette nuit, l’homme aux cheveux grisonnants et au visage creusé n’a pas dormi: une bombe est tombée sur sa maison, une bombe larguée par les avions de la coalition internationale. Heureusement, l’homme avait installé les siens près de la frontière turque pour les éloigner des attaques.
En septembre 2014, deux otages américains, James Foley et Steven Sotloff, partis en Syrie en tant que journalistes, étaient égorgés dans une comédie macabre orchestrée par les djihadistes de l’organisation Etat islamique (EI). La réaction ne s’est pas fait attendre. Le 24 septembre 2014, les Etats-Unis d’Amérique, aidés de leurs alliés arabes, attaquent pour la première fois les bases de l’organisation de l’EI en Irak. Quelques jours plus tard, des missiles Tomahawk tirés depuis les navires américains stationnés en mer Rouge et dans le Golfe visent également la Syrie.
Dès les premières frappes, les critiques des populations locales se font entendre. A l’instar de Mohamed, plusieurs habitants rassemblés autour de lui témoignent avoir vu des civils tués dans ces attaques. Ils racontent leurs peurs, leurs colères surtout. En août 2013, plusieurs zones dans la région d’Alep et Idlib tombent sous le contrôle des hommes de Daech, l’acronyme arabe qui désigne l’Etat islamique. Très vite, ces hommes en noir imposent leurs lois extrêmes: interdiction de fumer et d’écouter de la musique, couvre-feu obligatoire… «Ces gens ne sont pas comme nous. L’islam dont ils se revendiquent n’est pas le nôtre, ils veulent nous asservir», explique Mohamed.